DOLPHINEA INTRODUCTION Ils ont conquis les mers et les océans avant de devenir les compagnons fidèles des marins. Aimés de tous, les dauphins font partie aujourd'hui de l'univers familier de l'homme qui les sait capables d'exploits inhabituels. Il faut maintenant les protéger sérieusement contre les prédateurs de toutes sortes - y compris contre l'homme ! Comme les baleines, les dauphins sont des cétacés, véritables mammifères marins qui, au cours des temps et de leur évolution, se sont adaptés à la vie dans l'eau et ont perdu leur faculté de se déplacer à terre. HISTOIRE Les premiers cétacés sont apparus à l'éocène, il y a 50 millions d'années environ, et ont colonisé les mers alors que la Terre n'était encore qu'une jungle luxuriante.Le plus ancien de tous les fossiles, nommé "Pakicétus" par les paléontologistes, a été découvert dans les années 1980 en bordure de l'Himãlaya, à la frontière pakistanaise. Les études portant sur ses ossements ont montré qu'il s'agissait d'un animal quadrupède.Ce groupe se serait éteint au miocène, il y a environ 15 millions d'années, alors qu'apparaissaient les squalodontes ou premiers odontocètes (baleines à dents dont sont issus les dauphins). Des fossiles, découverts en Italie et dans la vallée du Rhin, ont permis de reconstituer le squalodonte type : les membres ont été remplacés par des nageoires, les narines ont migré sur le sommet de la tête, la mâchoire est pourvue d'un grand nombre de dents et le corps, fusiforme, mesure environ trois mètres de long. Il semble que son régime alimentaire et sa biologie aient été très proches de ceux d'un dauphin un peu particulier, l'orque actuel. Les squalodontes sont-ils les ancêtres directs des delphinidés ? De nombreux biologistes le croient, mais le doute subsiste encore parmi les scientifiques.Les delphinidés actuels comptent 31 espèces de toutes tailles et de toutes formes. Ils ont colonisé tous les océans, depuis les mers polaires jusqu'aux tropiques. Véritables mammifères, ils doivent respirer l'oxygène de l'air et non celui de l'eau comme le font les poissons. Mais leurs petits naissent dans l'eau comme ceux des poissons.Animal particulièrement intelligent, le dauphin est aimé de l'homme depuis la plus haute antiquité : des fresques crétoise (cf : mythologie) aux expériences de l'armée américaine, il est un des compagnons préférés des marins.Malheureusement, volontairement - par des pêches inutiles et abusives - ou involontairement - par la pollution du milieu aquatique -, l'homme a une influence néfaste sur la vie de cet animal pacifique. C'est pourquoi il est grand temps de prendre des mesures radicales pour le protéger DESCRIPTION PHYSIQUE 2,50 mètres de long, 150 kilogrammes, une température de 37°comme l'homme, un cerveau de 1700 grammes, un corps fusiforme le plus parfaitement hydrodynamique, merveilleusement doué : le dauphin se classe en tête de tous les animaux. D'une souplesse incomparable dans son élément aquatique, ce mammifère a développé une physiologie exceptionnelle. Il "voit" dans l'obscurité la plus noire, communique par ultra sons, peut plonger jusqu'à 600 mètres de profondeur en cinq minutes sans subir les méfaits de la pressions et ensuite de la décompression, respire l'air en surface à l'aide de poumons, mais peut rester en plongée près d'une heure, enfin il nage à 40 kilomètres à l'heure avec une aisance éblouissante. Sa peau est couverte de dizaines de milliers de petites vannes qui s'ouvrent, dès qu'il prend de la vitesse, pour permettre à l'eau de passer dans les vaisseaux capillaires et éviter un trop fort échauffement. INTELLIGENCE DU DAUPHIN Si le rapport cerveau -poids du corps est de 2% chez l'homme, il est de 1,2 chez le dauphin, mais chez ce dernier, le nombre des circonvolutions cérébrales est plus grand que chez l'être humain, et celui de ses cellules nerveuses, 50% supérieur. Enfin et surtout ce cétacé dispose à l'avant-tête d'un système de sonar d'une perfection inouïe. Le dauphin émet des sons et des ultra-sons lui permettant, par leur écho, de localiser n'importe quel objectif, fût-il microscopique, de détecter nourriture comme obstacle ou danger, même en pleine nuit. Pour ce faire, il émet sous l'eau des "clics" dont la fréquence varie selon ce qui le préoccupe : il s'agit de courtes impulsions explosives dont le nombre peut passer de 30 à plusieurs centaines par seconde ! Ceci lui permet de détecter avec une précision et une rapidité foudroyante l'objet de son intérêt : un poisson ou un banc de poissons, par exemple. Mais plus que cela, le dauphin possède un vrai langage : il dispose de 400 sons différents qui ont pu être enregistrés, et par l'intermédiaire des quel il parle à ses congénères, échangeant des informations détaillées sur les événements qui les concernent, en de longues conversations et concertations suivis d'actions individuelles ou collectives précises. Mille nasillements, cliquetis, gémissements, aboiement, sifflements et divers sons inaudibles à notre oreille, font partie de ce langage étonnant émis par plusieurs sources sonores, simultanément. Joueur, gai et pacifique, le dauphin semble plein d'humour. Manierait-il des idées ? Serait-il poète ou philosophe ? VIS SOCIALE DU DAUPHIN Très social, le dauphin vit en troupe et voyage librement dans les mers, choisissant les eaux dont la température lui plaît et où il trouvera facilement sa nourriture. C'est un animal planétaire. On en trouve dans tous les océans et même en eau douce, comme cette espèce qui vit dans les eaux du Gange, en Inde, ou dans celles de l'Amazone. Ses qualités exceptionnelles le mettent à l'abri des dangers naturels qui pourraient le menacer : l'épaulard, cet autre cétacé de 6 mètres de long, ou le requin-tigre. D'autre part, le dauphin est, de tous les animaux, le seul à accorder spontanément et gratuitement son amitié bon enfant et son aide à l'homme. Nombreux sont les marins ou les naufragés qui ont été guidés ou sauvés par les dauphins. Une troupe de dauphins accompagnant pendant des jours entiers un bateau suscite immanquablement un sentiment de joie et de sécurité. Il faut les voir évoluer à toute vitesse ou s'ébattre ! Une vie merveilleuse, en somme, un paradis sur terre... ou plutôt en mer. Le dauphin paraît avoir réussi à triompher de tous les problèmes, contrairement à l'homme, aux prises avec milles difficultés, dont beaucoup sont créées par lui-même. Son évolution semble une grande réussite. Mais est-ce là un aboutissement final ? Les dauphins sont-ils parvenus au terme de leur chaîne évolutive ? MYTHOLOGIE Dans la mythologie grecque, les peuples marins leur allouaient des exploits multiples car quand un bateau s'égarait, les dauphins les guidaient dans la tempête, mais aussi de nombreuses légendes sur les naufragés secourus par les dauphins. Les grecs représentaient surtout le dauphin commun et le dauphin rayé, qu'ils dessinaient avec réalisme, comme on peut le voir sur cette coupe datant de 550 - 510 av. J. -C. L'artiste raconte ici l'histoire du dieu Dionysos qui s'embarque pour se rendre de l'île Ikaria à Naxos. Comme cela était fréquent à l'époque, l'équipage était composé de pirates, qui décidèrent d'enlever le passager et de le vendre comme esclave. Quant Diontsos comprit leurs intentions, il transforma les haubans en serpents, immobilisa le bateau en le remplissant de lierre et joua de sa flûte. Epouvantés, tous les marins se jetèrent à l'eau, où ils se métamorphosèrent en animaux innoffensifs : les dauphins. L'homme, son lointain cousin terrestre, est fasciné. En représentant Dolphy en huile sur toile, les peintres de Collioure ne font que répéter les gestes séculaires. Les dauphins, depuis l'Antiquité, illustrent de nombreuses oeuvres d'art. Avec parfois, une dimension divine. N'est-ce pas en dauphins qu'Apollon se transforme pour guider des prêtres crétois dans le golfe de Corinthe ? Neptune, le dieu De la Mer, n'a pu séduire et épouser Amphitrite, fille de Nérée, que grâce à quelques delphinidés. Sans parler d'Eros, qui chevauchait fréquemment l'un de ces cétacés pour traverser les flots. Quant à Ulysse, il en fait ses armes. Le dauphin s'affiche sur son bouclier et sa bague. Hommage à ces animaux ayant sauvé son fils Télémaque de la noyade. "C'est offenser les dieux que chasser les dauphins, écrit le poète grec Oppien. Les dieux tiennent le massacre du monarque des profondeurs pour aussi exécrable que le meurtre d'un humain." Rome ne sera pas en reste. Pline l'Ancien raconte l'histoire d'un enfant qui s'était lié d'amitié avec un dauphin. Tous les jours, celui-ci le portait jusqu'à l'autre rive, où se trouvait l'école. Lorsque l'enfant tomba malade et mourut, son compagnon se présenta, fidèle, au rendez-vous. Avant de succomber de chagrin. Telle est la légende. LES LEGENDES Une autre légende raconte que, jadis, sur l'île de Lesbos, en Grèce, vivait Arion, un jeune musicien qui chantait et jouait de la cithare comme personne. On raconte qu'après avoir vécu à Corinthe, à la cour du tyran Périandre, il décida de se rendre dans les colonies de la Grande Grèce. En Sicile, il disputa et remporta tous les concours qui opposaient les meilleurs chanteurs et musiciens. Comblé de présents et d'argent, il voulut rentrer dans son pays et s'embarqua à Tarente, avec toutes ses richesses, sur un navire corinthien. Las, l'équipage était constitué de pirates qui décidèrent de le tuer pour s'approprier son trésor. Arion les supplia de l'épargner en échange de ses biens. En guise de réponse, ils lui enjoignirent de se jeter à la mer. Le musicien prit sa lyre, interpréta une complainte dont la beauté stupéfia les matelots, puis plongea. Un dauphin le prit immédiatement sur son dos et le ramena sain et sauf sur la terre, près du cap Tenare. De là, Arion regagna la cour de Périandre, auquel il conta son aventure. Quand les pirates débarquèrent à Corinthe, le roi leur demanda des nouvelles du musicien. Ceux-ci prétendirent qu'ils l'avaient laissé à Tarente, mais lorsque Arion fit son apparition, ils ne purent mentir d'avantage et furent obligés de restituer l'argent qu'ils lui avaient volé. C'est donc grâce à un dauphin qu'Arion recouvra tous ses biens. La légende d'Arion est certainement la plus connu et celle qui exprime le mieux le rapport qui a toujours uni les hommes et les petits cétacés. Pour les Grecs, ces derniers étaient sacrés, et leur nom associé au culte d'Apollon à Delphes, près du mont Parnasse. ARISTOTE ET LES DAUPHINS Mais peu de récits font preuve d'une réelle connaissance de cet animal. Seul Aristote, dans son "Histoire des animaux", en reconnaît la nature mammalienne et le décrit comme une créature douce, à l'intelligence presque humaine. Son comportement, sa biologie restent un mystère. La fascination, elle, est intacte. Le dauphin est un animal mythique et il appartient au patrimoine culturel de nombreux peuplent côtiers du monde entier, dont certains existaient déjà il y a 4 000 ans. Il inspira chantres et poètes, mais aussi des peintres et des sculpteurs, et dès les IVe et Ve siècles avant Jésus-Christ il figure souvent sur les peintures et les mosaïques crétoises, romaines, chinoises et indiennes. On gravait déjà un dauphin -symbole de chance - sur les pièces de monnaie avant la civilisation grecques, une coutume encore en vigueur à des époques plus récentes. De tous les cétacés, les plus représentés étaient les delphinidés, notamment le dauphin commun, le souffleur et l'orque. Ces animaux avaient la réputation d'entretenir des relations particulières avec l'homme, d'être gentils, nobles et doués de pouvoirs surnaturels, d'exprimer l'esprit qui anime la nature et même d'avoir une forme d' "intelligence". A l'instar des Anciens, l'homme a toujours eu tendance à pratiquer l'anthropomorphisme vis-à-vis de ces extraordinaires créatures marines. Nos ancêtres ne se sont pas laissé tromper par le corps pisciforme des dauphins : sans même savoir qu'il s'agissait de mammifères, et sans bien connaître leur anatomie ni leur physiologie, ils étaient persuadés qu'ils avaient beaucoup de choses en commun avec eux. Mais les légendes servent aussi à expliquer ce que l'homme ne parvient pas toujours à comprendre !